mardi 10 juin 2014

Construire un nouveau récit émancipateur

Le séisme politique que nous venons de vivre n’est pas le premier du genre mais il nous enjoint une fois de plus à penser et à mener enfin l’indispensable contre- offensive pour reprendre la main politique et idéologique face à l’extrême droite et, parce que l’un ne va pas sans l’autre, face aux forces libérales et néo-conservatrices, aux tenants de l’ordre actuel.
Comment le faire ? Tout d’abord en cessant de croire à la fable qui décrit le vote Fn comme un simple cri alors qu’il est de plus en plus un vote d’adhésion en faveur d’une conception de la société aux antipodes des valeurs de gauche. Va-t-on enfin prendre conscience que le Rassemblement  bleu marine se pose désormais en alternative au capitalisme néolibéral, mondialisé et financiarisé auquel il veut substituer un capitalisme nationaliste, autoritaire, néo-conservateur, identitaire et xénophobe. La voie lui est d’autant plus ouverte que l’Ump et le Ps s’inscrivent dans la cohérence libérale incarnée par l’Europe et la gauche alternative a un mal fou à élaborer et rendre lisible une démarche post capitaliste.
Ensuite en renonçant définitivement au leurre du Front républicain qui n’est que le dernier avatar d’une collaboration de classes sur fond de ralliement aux thèses libérales. La vraie question est plutôt de construire un pôle de rassemblement de la gauche antilibérale, sociale et écologique face aux 2 autres pôles qu’annonce la recomposition politique en cours : le pôle bleu et bleu marine autour du Fn et d’une partie de la droite et le pôle social-libéral autour du Ps et des centristes.
Enfin et c’est sans aucun doute le plus important, en faisant en sorte que la gauche de transformation sociale soit en mesure d’offrir un projet et une démarche susceptible de répondre aux 3 questions majeures que pose la crise.
 -Comment faire face à la montée des peurs et des angoisses générées par la crise économique et sociale, les replis sur soi, les divisions, la xénophobie et l’obscurantisme qu’elle provoque ? Il nous faut pour cela renouer les liens de la solidarité entre toutes les victimes, quelques soient leur âge, leur origine, leur appartenance sociale ou territoriale. C’est la condition de la renaissance d’une conscience de classe, celles des dominés, et d’une hégémonie culturelle progressiste  à la hauteur des enjeux du temps.
-Comment affronter la fracture démocratique entre le peuple et sa représentation, entre les citoyens et la politique ? Il faut le faire en refondant notre conception de l’Etat, de la République, de la laïcité et de la démocratie, par une révolution dans nos manières de faire de la politique. « Prenez le pouvoir »  reste un slogan creux si nous ne lui donnons pas de chair.
Comment prendre à bras le corps la crise du sens qui fait perdre tout repère et l’idée même qu’il est possible d’influer sur le cours des choses ? Au face à face mortifère entre le néo-libéralisme qui aliène la condition humaine, la nature et la culture et le national-populisme, chronique annoncée d’un totalitarisme pour les temps qui viennent, il nous faut d’urgence inventer un nouveau récit émancipateur. Celui-ci doit croiser l’espérance communiste à l’égalité, le rêve féministe et libertaire à l’épanouissement des droits de chacune et chacun, l’urgence écologique à faire de la planète notre bien commun, l’utopie de la mondialité culturelle à faire vivre chacune d’entre elle comme leur nécessaire relation, enfin l’aspiration citoyenne à décider du local au global.
La contre-offensive que j’appelle de mes vœux passe par l’invention d’un grand dessein qui définit une nouvelle utopie, les valeurs et les idées qui les accompagnent pour alimenter les rêves et les désirs  afin de rouvrir l’espoir.
C’est en éclairant l’avenir que nous nous garderons de la barbarie.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire