Comme tout le monde en ce début d’année je reçois et j’échange
des vœux. Des vœux personnels certes de santé et de bonheur pour chacune et
chacun d’entre nous. C’est essentiel. Mais aussi des vœux pour le monde tel
qu’il va. Ce qui me frappe à ce propos c’est le manque d’enthousiasme de mes
proches vis-à-vis de l’année qui s’ouvre. Au mieux elle apparait comme l’année
de toutes les résistances, au pire comme celle de toutes les catastrophes. Face
à un monde où les guerres s’installent durablement et apparaissent sans issues,
où les inégalités atteignent des niveaux vertigineux, où de Berlin à Istanbul
la violence aveugle se déchaine, où l’arrivée au pouvoir de Trump semble
annoncer chez nous celle de Fillon voire de Le Pen, où les violences faites aux
femmes, l’homophobie, le racisme ordinaire se banalisent, les personnes les
mieux intentionnées sont pour le moins sceptiques sur ce que peut apporter de positif 2017. Je comprends ce « pessimisme
de la raison » et pour une part je le partage. Mais je pense malheureusement
que pour le faire reculer il ne suffira pas de lui opposer un « optimisme
de la volonté » en se contentant d’affirmer que 2017 sera ce que nous en
ferons. L’année qui vient, je dirai même les années qui viennent, appellent
plus que cela. Pour que le malheur succombe, que l’arrogance et l’imposture reculent,
que l’obscurité cède face aux lucioles, il nous faut faire preuve de lucidité
dans l’analyse, d’esprit de rassemblement et de courage politique pour inventer
et imposer une alternative.
Le monde va mal, c’est un constat que tout le monde partage
si l’on excepte l’extrême minorité qui s’approprie les avoirs, les savoirs et
les pouvoirs. Encore faut-il justement avoir la lucidité d’analyser le lien de
causalité entre cette domination quasi totalitaire et l’état d’un monde devenu
fou parce qu’il se nourrit des désespoirs et des haines que cette domination
produit. Il faut aussi avoir la lucidité de déceler que face à ce monde qui se
meurt de ses propres turpitudes, un autre monde émerge fait de solidarité, de
partage, de respect de la nature, de cultures ouvertes aux autres, d’aspiration
à vivre ensemble dans la recherche du bien commun. Le monde d’aujourd’hui c’est
à la fois Airbus qui licencient malgré ses énormes profits et ces milliers de
sociétés coopératives telle 1336 qui inventent une nouvelle économie, cette
Europe sans cœur qui rejette les réfugiés et ce paysan des Alpes maritimes qui
les accueille, ce spectacle politique de plus en plus anachronique et ces
peuples de par le monde qui se révoltent et expriment une formidable aspiration
démocratique.
Ce sont ces acteurs du monde de demain qu’il faut unir en
bannissant tout sectarisme d’où qu’il vienne. Car ils inventent une utopie
concrète qui met l’homme et son environnement au centre d’une nouvelle aventure
politique émancipatrice.
Irréaliste face au clair-obscur et aux monstres qu’il produit ?
Rappelons-nous sans cesse ce vers d’Hölderlin : « Là où croit le
péril croit aussi ce qui sauve ». Bonne année !
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