Par Alain HAYOT, chronique dans La Marseillaise,
Abstention record, sanction pour l’UMP, poussée du FN, percée du Front de Gauche au sein d’une bonne tenue globale de la gauche, ce premier constat mérite qu’on s’y arrête.
Election après élection, l’abstention progresse et marque une défiance de plus en plus grande à l’égard de la politique et des politiques.
Seule exception, la présidentielle de 2007 où une partie des milieux populaires ont cru au volontarisme sarkozysme, espoir vite déçu. Il y a désormais un fossé béant entre les urgences sociales et les aspirations populaires d’une part et l’offre politique d’autre part. Toutes les forces politiques sont interpellées, singulièrement celles de gauche : en terme de projet comme de pratiques politiques.
La droite se prépare à sa manière à y répondre : le recul de l’UMP se fait essentiellement au profit du FN qui tire les marrons d’un feu attisé par la droite elle-même. Mais va-t-on en finir avec l’idée qu’il s’agit d’un simple vote protestataire : je fais partie de ceux qui alertent depuis longtemps : le vote FN est de plus en plus un vote d’adhésion à un projet de société fondé sur la préférence nationale, le rejet des immigrés et la peur des pauvres dédouanant ainsi les riches de leurs responsabilités dans la crise profonde du capitalisme et de la civilisation occidentale qui lui donne forme et sens.
Quoiqu’en pense Alain Duhamel, le Front National n’est pas le nouveau parti de la classe ouvrière. Il suffit de regarder les résultats des cantonales : le vote FN est majoritairement situé, non dans les cités populaires mais dans les résidences habitées par ceux qui ont peur de les perdre.
La droite républicaine ne combat pas le FN, dans les faits elle le conforte et le légitime chaque jour un peu plus. Elle fabrique le terreau social qui alimente les peurs et délite le vivre ensemble ; elle valide en les reprenant à son compte la xénophobie, les discours anti immigrés, islamophobe et sécuritaire des Le Pen ; elle vient de franchir un pas supplémentaire à l’occasion de ces cantonales : désormais l’UMP ne s’opposera plus au FN en cas de duel avec la gauche.
Va-t-on en finir avec cet autre discours qui fait croire que si l’UMP court après le FN c’est pour des raisons électorales. La droite française est idéologiquement acquise aux thèses défendues par le FN et elle prépare progressivement mais surement les esprits à une alliance politique avec lui. Elle a acquis la conviction d’être parvenue à construire une véritable hégémonie culturelle dans l’électorat de droite fondée sur les valeurs populistes et néo conservatrices. Son projet politique est à terme de s’appuyer là-dessus pour pérenniser sa domination au service de l’oligarchie financière.
C’est à ce niveau là, que doit se situer la contre offensive de la gauche, projet contre projet, valeurs contre valeurs.
L’ampleur de l’abstention aux cantonales est majoritairement populaire. Elle indique vis-à-vis de la gauche un attentisme réel sinon une méfiance. Nicolas Demorand écrit dans un éditorial de Libération : « à quatorze mois de la présidentielle, les socialistes n’ont rien à dire au peuple… sur le chômage et l’emploi, l’industrie, la mondialisation… peut-être que tout cela existe dans les placards de la rue de Solferino… ».
Et si Demorand regardait du côte du Front de Gauche qui fait une remarquable percée (plus de 10 %) lors de ce 1e tour des cantonales ?
Pas dans ses placards mais à l’écoute de ses forums, de son projet partagé. Et si c’est de ce côté que s’ouvrent des perspectives nouvelles pour toute la gauche ?
J’y reviendrai la semaine prochaine.
D’ici là le combat continue contre la droite et son extrême.
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