lundi 9 mai 2011

DE BUCKINGHAM AU VATICAN LE SENS DES RITUELS

Ce week-end les médias nous ont gavés à l’extrême avec les cérémonies du mariage princier britannique et la béatification du défunt pape Jean-Paul II.
Ni le suicide d’un cadre de France Télécom, ni l’odieux attentat de Marrakech ne les ont détournés. Ils avaient décidé que c’est ce que demandait le peuple et leur mobilisation a été totale. Mais n’esquivons pas le débat : Quel sens a, dans l’Europe d’aujourd’hui, une monarchie sans pouvoir réel et qui présente tous les symptômes d’un archaïsme historique où le ridicule et l’hypocrisie le dispute à l’indécence et au scandale. Quel sens a, dans une Europe profondément sécularisée, la sanctification d’un personnage dont l’action certes complexe a été émaillée de décisions aussi problématiques que le refus de lutter contre le sida, ou les tentatives d’étouffer les pratiques pédophiles dans l’église.

On nous explique que la couronne britannique est fédératrice des peuples qui forment le Royaume Uni et que l’identification populaire à un pouvoir symbolique n’a d’autre fonction que de célébrer l’appartenance à une communauté nationale. Stéphane Bern pense même que c’est ce qui a permis aux anglais d’éviter le populisme.

De même dans un monde où tout change et où les individus ont le sentiment de ne plus rien maîtriser, la monarchie et ses fastes, la papauté et ses rites apparaissent comme des repères immuables qui rassurent et protègent.

Et si c’était l’inverse ? Et si ces cérémonies étaient le révélateur d’une crise profonde de la civilisation occidentale qui ne parvient plus «à faire société», dont les systèmes démocratiques nés au 19ième siècle sont en voie d’épuisement et ne parviennent plus à répondre aux aspirations sociales et culturelles !

Je suis frappé par la concomitance dans l’actualité de ces deux célébrations et des poussées populistes que tous les observateurs constatent en Europe. Au Royaume Uni derrière les sourires glamour de Kate et William se prépare une régression sociale d’une ampleur telle que les années Thatcher apparaîtront «soft». Partout les directives européennes servent de cadre de référence à des politiques qui ferment toutes perspectives de progrès et suscitent au contraire des reculs, des replis et des angoisses collectives dont le populisme fait ses choux gras.
Et les seules antidotes seraient de trouver un peu de réconfort dans le souvenir d’un pape «bienheureux» ou de l’enthousiasme devant l’image «amour, gloire et beauté» des grands de ce monde mis en scène la complaisance des médias ?
Opium du peuple ? Oui et non. N’oublions pas que Marx, auteur de cette formule disait qu’elle marchait de pair avec ce qu’il appelait «le soupir de la créature opprimée». Or il n’y a pas de fatalité à la résignation.

On veut nous convaincre que l’espérance en un monde plus juste et plus libre n’est plus à l’ordre du jour mais nous devons refuser ce diktat et ne pas laisser le champs libre aux idéologies réactionnaires, à ceux qui prônent de nouvelles guerres entre les religions, les ethnies, les civilisations.
Les peuples du sud de la Méditerranée nous montrent la voie : l’Europe a besoin de réinventer la démocratie et la liberté, la solidarité et le progrès social, les lumières et les idées émancipatrices. Si le monde est complexe, il existe une autre voie que celle du malheur social et de la haine de l’autre. N’ayons pas peur et ne nous laissons pas endormir par des rituels d’un autre âge. Le meilleur antidote reste la démocratie, l’intervention citoyenne et l’invention du nouvelle utopie libératrice.

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