mardi 4 octobre 2011

La primaire socialiste : une innovation démocratique ?

A en croire Olivier Duhamel dans ces mêmes colonnes, la primaire organisée par le PS est une innovation démocratique. Je ne partage pas du tout ce point de vue pour au moins trois raisons :
1- La primaire s’inscrit dans la logique présidentialiste de la Ve République. Elle en aggrave le caractère foncièrement antidémocratique en résumant le débat au choix d’un individu à qui l’on remet les pleins pouvoirs. Le PS veut conforter ce système après François Mitterrand qui qualifiait la Ve République de « coup d’Etat permanent » pour s’y installer sitôt élu en 1981 et après Lionel Jospin qui a inversé le calendrier électoral au détriment du parlement.
Moi, je veux pouvoir voter pour en finir avec l’élection du Président de la République au suffrage universel et pour une 6e République qui donnerait le pouvoir au peuple du local au global.
2- La primaire accentue la personnalisation de la vie politique et amène à voter non pour des idées mais pour celle ou celui qui a le plus de chances de gagner. Vous appelez débats contradictoires ces longues soirées télévisées où la question est de savoir, non pourquoi il faut refuser la règle d’or, mais à quel moment il faudra l’appliquer ? Ou bien de savoir s’il faut plus ou moins contrôler les banques ? Ou bien encore quel est le degré de répression dans une politique par définition sécuritaire. ?
Moi, je veux pouvoir voter pour un projet de gauche qui rompt clairement avec le libéralisme et le populisme. Un projet qui a le courage d’affronter les marchés financiers, en créant un pôle public bancaire, en refusant les directives du FMI et de la commission européenne, pour une économie dominée non par la concurrence mais par l’humain, sa formation, son travail, sa vie et son environnement.
3- La primaire ne tire pas la leçon de la victoire historique de la gauche au Sénat : les élus locaux ont sanctionné la conception antidémocratique de la politique qui sous entend la contre réforme territoriale. Ils ont exprimé la même aspiration démocratique, décentralisatrice et participative portée par l’ensemble des Français. Ceux-ci ne veulent plus qu’une élite autoproclamée pense à leur place et agisse en leur nom.

Dans les débats des primaires, où le « je » a dominé, jamais l’idée d’une autre conception de la politique n’a affleuré. Pourtant si le rejet de Sarkozy ne suffira pas pour le battre, il faudra lui opposer un projet alternatif porteur des réponses aux aspirations populaires. Un tel projet ne peut se faire sans le peuple et la primaire est le contraire d’un débat citoyen et populaire. Elle instaure «au sommet du PS une forme d’individualisme concurrentiel bien dans l’air du temps libéral » (Rémi Lefebvre, « La primaire socialiste, la fin du parti militant »). C’est le « faites moi confiance » qui domine et non le «réfléchissons et agissons ensemble ».
C’est pourquoi la primaire socialiste, quelque soit le nombre de ceux qui iront voter est une régression de la démocratie, affaiblissant les partis politiques et accentuant l’américanisation de la vie politique française.
Or pour battre la droite, la gauche doit « contribuer à la formation d’un puissant mouvement citoyen, d’une insurrection des consciences qui puisse engendrer une politique à la hauteur des exigences » (S. Hessel et E. Morin, « Le chemin de l’espérance »).
C’est précisément la démarche du Front de Gauche qui emprunte le chemin de cette espérance et c’est pour cela que le 22 avril 2012, lors du 1e tour de l’élection présidentielle, je voterai pour son candidat. C’est ce jour-là qu’aura lieu la véritable primaire à gauche afin de répondre à une vraie question : quelle politique, quelle société voulons-nous ?

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