lundi 9 janvier 2012

Crise de la dette ou crise de civilisation ?

2011 a révélé l’ampleur et la gravité de la crise mondiale en même temps que s’est exprimée une vague d’indignation à l’encontre de la religion du marché et l’adoration du Dieu profit.
Nous vivons « des temps déraisonnables » où l’ancien n’en finit pas de mourir et le nouveau a du mal à émerger pour reprendre la célèbre formule de Gramsci.
Il est pourtant urgent de penser un avenir radicalement différent de celui que nous infligent les libéraux et les populistes unis pour sauver un capitalisme à bout de souffle. Encore faut-il s’entendre sur la nature de la crise et les moyens de la conjurer.
C’est en effet non à une simple crise financière encore moins à une crise de la dette publique que nous avons à faire mais à une véritable crise de la civilisation occidentale que le capitalisme incarne désormais totalement.
Le roi est nu : nous vivons le triomphe mais aussi l’échec d’une vision du monde qui prétend soumettre toutes les activités humaines comme la planète aux exigences de la rentabilité financière et du productivisme aveugle. Résultat : une croissance sans justice sociale ni souci environnemental, une privatisation des biens communs, une dévalorisation de l’idée même de progrès, une aliénation des êtres humains comme des peuples, à des puissances économiques qui dictent leur destin.
De prétendus experts, « les think tanks », au service des forces de l’argent érigent en dogme une pensée où dominent les valeurs de concurrence et de domination, de performance et d’appropriation inégalitaire des avoirs, des savoirs et des pouvoirs, d’efficacité économique et de rationalité technocratique.
L’urgence est à réhabiliter la politique, à redéfinir le sens et la finalité humaine de la société. Pour cela il faut redonner à la pensée critique sa dignité contre « l’expertise » qui prétend réfléchir et agir à la place du peuple lui déniant toute compétence à écrire sa propre histoire. Au discours prétendument rationnel et technique qui nous incite à la fatalité face à des forces obscures et terrifiantes : il faut opposer une autre ambition politique, une nouvelle utopie émancipatrice, le souffle populaire d’une civilisation humaine.
Substituer à la concurrence, la coopération et l’association, la « relation » pour reprendre l’expression d’Edouard Glissant lors de la révolte des Antilles pour les « produits de première nécessité ».
Aux eaux glacées du calcul égoïste il faut opposer une démocratie de la participation de tous à la décision « la révolte des indignés se révèlent comme une insurrection morale orpheline d’une volonté politique qui restituerait à l’humain toute sa dignité » écrit Roland Gori dans son dernier ouvrage « la dignité de penser ».
Puisse 2012 nous inciter à agir dans ce sens afin que s’opère non une alternance où « tout change pour que rien ne change » mais un vrai changement à la hauteur de la civilisation humaine à laquelle nous aspirons tous. Il faut inventer car « notre héritage n’est précédé d’aucun testament » (René Char).
Bonnes fêtes de fin d’année et à 2012.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire