mardi 18 septembre 2012

Marseille

Depuis plusieurs semaines Marseille est au centre de l’actualité. Les règlements de compte à répétition ont suscité des réactions qui ont une même capacité à ne traiter que la face sécuritaire des problèmes. Les uns veulent faire appel à l’armée et transformer la cité phocéenne en camp retranché, les autres se contentent de nommer un énième Préfet de Police qui succèdera au Préfet à l’Egalité des chances. Le symbole est fort.
Et si la question posée était précisément celle-là. Lorsqu’on examine une carte des meurtres commis en 2012 à Marseille et qu’on la croise avec celle de la précarité sociale on est frappé par l’extrême corrélation entre les données spatiales et les données sociales. 9 meurtres sur 14 ont été commis dans les cités populaires des quartiers Nord, 2 dans les 2 rares poches de pauvreté des quartiers Sud et 3 dans celles de l’est marseillais.
Marseille n’est pas une ville pauvre qu’il faudrait classer en totalité dans cette catégorie. C’est une ville profondément inégalitaire : près de 70 % des ménages sont imposés dans le 8e arrondissement au Sud, alors qu’ils ne sont pas 40 % dans le 15e arrondissement au Nord.
Les Rmistes sont 8 fois plus nombreux au nord où le taux de chômage est proche de 30 % alors qu’il est inférieur à 10 % au sud. On constate même des pointes à 50 % dans certaines cités du 15e ou du 14e arrondissement.
Ce sont dans ces cités que les trafics de drogue sont les plus prospères, que plusieurs gangs se partagent le territoire et font vivre une économie informelle et illégale qui se substitue à l’autre d’autant plus facilement qu’elle fait vivre des familles entières où elles puisent une main d’œuvre disponible.
Alors faut-il dépénaliser le commerce du cannabis, le placer sous contrôle public et tarir un marché extraordinairement juteux ? Sans doute faut-il ouvrir ce débat mais pour autant les problèmes seront-ils résolus ? L’inégalité, (cf. J. Stiglitz) est à l’origine des dysfonctionnements de nos sociétés développées. La loi du marché concentrent la richesse à un pôle minoritaire au détriment du reste de la population dont une part est plongée dans une extrême pauvreté : c’est là que l’on attend que la politique change les choses, à Marseille comme ailleurs, et en finisse « avec les eaux glacées du calcul égoïste » imposés par les marchés financiers, le management des entreprises et un Etat qui loin de réguler, renforce cette situation comme le démontre tous les jours l’Europe du traité Sarkozy/Merkel que F. Hollande nous propose de ratifier.
De même J.M. Ayrault propose aux Bouches-du-Rhône la métropole comme solution à tous les problèmes. C’est vite oublier que c’est une invention sarkozienne, destinée à aggraver l’inégalité de pouvoir, celle du citoyen vis-à-vis d’une institution locale technocratisée à l’extrême qui n’aura pour mission que de dupliquer les politiques d’austérité de l’Etat.
C’est d’une autre décentralisation dont nous avons besoin, aux mains des citoyens dans les territoires et des salariés dans les entreprises, susceptibles de mettre en œuvre des services publics et des politiques au profit de tous.
Marseille ne mérite ni tant d’honneur ni tant d’iniquité. Elle est à l’image de notre société. Peut-être a-t-elle simplement pris l’habitude d’anticiper ce qui se déroule partout.

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