vendredi 14 février 2014

Qu’est-ce qu’on attend ?

La 5e vague de l’enquête du CEVIPOF sur le baromètre de la confiance politique dans notre pays indique un état de déprime de l’opinion, la progression des attitudes de repli sur soi, de réflexe sécuritaire et de rejet de l’autre, l’attachement à la famille. Elle montre également l’ampleur du discrédit européen et de la crise politique qui traduit désormais une véritable fracture démocratique.
Ces tendances très inquiétantes sont à l’œuvre depuis plusieurs années. Leurs progressions doivent nous alerter et à nous inciter à réagir.
Mais le fait nouveau que nous apprend cette enquête c’est qu’elle montre que la « gauchisation » de l’opinion, au moment de la présidentielle, exigeant plus de justice sociale, plus de démocratie, plus de maîtrise de la finance (à l’origine du discours du Bourget de Hollande contre la finance), a laissé place à un grand désenchantement.
L’absence du changement annoncé et l’aggravation du chômage et des conditions de vie n’ont pas poussé à une radicalisation à gauche mais au contraire à une droitisation de l’opinion.
Outre les résultats inquiétants que j’évoquais plus haut on constate une poussée en faveur du libéralisme économique. A la question de savoir si l’Etat doit contrôler ou faire confiance aux entreprises pour résoudre les difficultés, une majorité désormais penche pour la confiance contre le contrôle.
En même temps cette enquête montre contradictoirement que nos concitoyens continuent de penser « qu’il faut prendre aux riches pour donner aux pauvres » et qu’il faut « réformer » le capitalisme. Surtout ils pensent majoritairement que « les gens peuvent changer la société par leur choix et leurs actions ». Ils disent encore leur intérêt pour la politique malgré le rejet du système actuel.
Cette enquête laisse entrevoir une opinion publique en voie de droitisation, sensible aux pressions idéologiques libérales et populistes. En même temps, elle a conscience que le système actuel doit être « réformé » et elle est prête à agir pour changer les choses.
Cette étude, d’un laboratoire de sciences/Po, met le doigt sur une question essentielle : la politique du pouvoir actuel ne satisfait plus mais en l’absence d’une offre alternative de gauche clairement lisible, l’opinion est sensible à l’offensive ultra-réactionnaire sur le plan économique comme sur les questions de société.
Or le Front de gauche, paralysé par de ridicules querelles de logos, est l’arme au pied face au danger. Le succès de la visite à Paris d’Alexis Tsipras, qui sera le candidat du Parti de la gauche européenne aux prochaines élections, le fait que son parti, Syriza est donné gagnant en Grèce nous montre la voie. Si la gauche de transformation sociale, antilibérale et antiaustéritaire est capable de reprendre le flambeau des journées de février 34 contre la peste brune et les 200 familles alors la perspective d’un nouveau Front populaire peut devenir crédible. Dans le cas contraire le pire est possible. Qu’est-ce qu’on attend ?

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