Le caractère historique de l’évènement que nous venons de
vivre n’échappe à personne : « il est des épreuves qui révèlent une
nation à elle-même « (Edwy Plenel), « évènement monstre, expression
du merveilleux démocratique « (Pierre Nora). L’irruption du peuple pour
défendre la liberté, pour refuser tout amalgame et promouvoir la fraternité
ouvre des possibles pour ceux qui sont Charlie mais aussi pour ceux qui ne le
sont pas. Mais rien n’est automatique et tout dépendra des réponses apportées.
Nous sommes à un tournant et nous savons bien qu’en cas d’échec ce sont les
forces populistes, obscurantistes et xénophobes qui tireront les marrons du
jeu.
Le débat est donc essentiel. Faut-il par exemple écouter
Malek Boutih et mettre les quartiers populaires sous tutelle en écartant les
élus locaux ? Faut-il répondre aux drames que nous venons de vivre par la
déchéance de nationalité voire l’instauration d’un délit « d’indignité
nationale » ? Ne faut-il pas au contraire affronter les vrais
problèmes secrétés par la société française ?
Quand M. Valls fait semblant de découvrir les situations
« d’apartheid ». (Le concept n’est pas adapté à une réalité autrement
plus complexe) j’ai irrésistiblement envie de lui répondre qu’il est bien temps
de faire un constat qui n’est que le produit des politiques menées depuis une
dizaine d’années, par Sarkozy, Hollande et…. Valls.
Faut-il rappeler l’accélération brutale des politiques
austéritaires, la réduction drastique des services publics, les mesures exclusivement
sécuritaires ? Faut-il rappeler la continuité des discours ethnicistes,
racistes et discriminatoires à l’égard des Roms, des immigrés ou des français
d’origine immigrée ?
Faut-il rappeler l’absence de réaction des pouvoirs publics à
la médiatisation permanente de la haine distillée par Marine le Pen, Zemmour,
Finkelkraut, Meynard et autres Houellebecq ? Ce que Valls appelle
l’apartheid a été fabriqué socialement et culturellement et le couple
Hollande-Valls y a largement pris sa part. En a-t-il tiré les enseignements ?
Manifestement non puisque F. Hollande déclare vouloir s’appuyer sur l’esprit du
11 janvier pour poursuivre ce qu’il nomme son « action réformatrice »,
la loi Macron par exemple. Les quelques inflexions à l’austérité budgétaire concernent
exclusivement les effectifs militaires et policiers. Rien pour l’éducation sinon
des vœux pieux sur la mixité sociale et un appel pour le moins ambiguë à la
morale et à la discipline ; rien sur la culture pourtant essentielle ; rien
sur le social ; rien enfin pour permettre une citoyenneté plus active dans
les quartiers populaires.
Pendant ce temps les affaires continuent et Hollande va à
Davos parler avec les 1% de la population mondiale qui possède l’équivalent de
ce que se partage les 99% restant.
Mais l’espoir peut renaître. Nos regards ce weekend end ne
seront pas tournés vers Davos mais vers Athènes où Syriza peut ouvrir la voie.
Le meeting parisien de soutien au rassemblement mené par Alexis Tsipras a été
l’occasion de réunir J. L. Mélenchon, P. Laurent et C. Autain mais aussi C. Duflot,
des représentants d’Attac et d’autres mouvements citoyens, des députés
socialistes. Cela semble inquiéter Cambadélis. Tant mieux c’est peut-être
l’indice que « demain sera un autre jour ».
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