mardi 22 septembre 2015

Des migrants à la culture : le poids du lepénisme

Jamais l’air du temps n’a été aussi influencé par le lepénisme. C’est vrai autour du débat sur les migrants mais c’est aussi vrai pour la culture avec les violentes attaques contre l’art à Marseille, au Château de Versailles ou à nouveau contre Charlie Hebdo.
Le FN donne le la au débat politique. On le mesure au vent de xénophobie que fait souffler Sarkozy, à la façon dont Valls conditionne la solidarité à la fermeté à nos frontières, aux comportements de municipalités nombreuses à ne plus faire de la culture une priorité.
Répétons que l’entreprise de dédiabolisation initiée par Marine le Pen ne consiste pas à changer la nature du FN. C’est une mise à jour face aux enjeux contemporains, une utilisation des mots d’aujourd’hui, une réponse adaptée aux peurs provoquées par la crise.
Mais sur le fond jamais le clan le Pen n’a été autant sur la même longueur d’onde. Au point que le père a qualifié le dernier discours de sa fille à Marseille de « jeanmariste » et que la nièce se retrouve chez l’un comme chez l’autre.
Que dit en effet le FN sur les migrants : gonflée par la reculade de Merkel et par le refus des pays de l’Est d’ouvrir leurs frontières, Marine le Pen parle désormais de « submersion migratoire ». Elle ne se démarque plus du fantasme du « grand remplacement ». Ses propositions se situent clairement à l’extrême droite : son intention de sortir de l’Europe est nourrit par un repli nationaliste qui exacerbe la haine de l’autre, ces « barbares » venues des mondes arabes et africains, ces galeux d’immigrés, de musulmans à qui elle veut retirer le droit du sol et toute aide sociale au profit d’une prétendue priorité nationale. Comme si le logement, l’hôpital ou l’école souffraient d’abord d’une présence étrangère ; comme si notre histoire ne témoignait pas du fait que, contrairement aux arbres, le genre humain n’a ni souche, ni racine mais un cerveau pour penser, le langage pour échanger, des pieds pour bouger et une conscience pour éprouver des émotions personnelles et collectives.
Son projet, radicalement opposé à toute démarche humaniste n’est pas en reste sur d’autres terrains.  Ainsi de la culture où le FN s’investit fortement ces derniers temps. Là aussi il tente d’exploiter le désarroi identitaire de millions de français dans une Europe et un monde qui leur échappe. Dans les communes qu’il dirige souvent allié à des groupuscules intégristes et identitaires, il pratique des actes de censure. Dans le pays il mène des actions violentes contre la création contemporaine qualifiée au mieux d’élitiste et de bobo, au pire de pédopornographique.
Ne nous y trompons pas : ce que rejette le FN c’est la capacité de l’art à transgresser le réel, à innover, à anticiper le changement. Il prétend savoir ce que le peuple veut en matière culturelle. En vérité, il tente de l’enfermer dans une vision folkloriste et sclérosée du patrimoine et dans un divertissement déconnectant la culture de toute vision critique et émancipatrice.
Car le fond du problème est là : le FN ne veut pas d’une société de liberté pour chaque individu, d’égalité et de droit pour tous, encore moins de fraternité entre chacun-e- quelques soient les origines et les convictions.
In fine c’est la démocratie qu’il combat et c’est pour cette raison qu’il rallie ceux qui le pensent incontournable pour conserver l’ordre inégalitaire établi et surtout pour s’opposer à toute marche populaire et citoyenne vers l’émancipation.

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