Jamais l’air
du temps n’a été aussi influencé par le lepénisme. C’est vrai autour du débat
sur les migrants mais c’est aussi vrai pour la culture avec les violentes
attaques contre l’art à Marseille, au Château de Versailles ou à nouveau contre
Charlie Hebdo.
Le FN donne
le la au débat politique. On le mesure au vent de xénophobie que fait souffler
Sarkozy, à la façon dont Valls conditionne la solidarité à la fermeté à nos
frontières, aux comportements de municipalités nombreuses à ne plus faire de la
culture une priorité.
Répétons que
l’entreprise de dédiabolisation initiée par Marine le Pen ne consiste pas à
changer la nature du FN. C’est une mise à jour face aux enjeux contemporains,
une utilisation des mots d’aujourd’hui, une réponse adaptée aux peurs
provoquées par la crise.
Mais sur le
fond jamais le clan le Pen n’a été autant sur la même longueur d’onde. Au point
que le père a qualifié le dernier discours de sa fille à Marseille de
« jeanmariste » et que la nièce se retrouve chez l’un comme chez
l’autre.
Que dit en
effet le FN sur les migrants : gonflée par la reculade de Merkel et par le
refus des pays de l’Est d’ouvrir leurs frontières, Marine le Pen parle
désormais de « submersion migratoire ». Elle ne se démarque plus du
fantasme du « grand remplacement ». Ses propositions se situent clairement
à l’extrême droite : son intention de sortir de l’Europe est nourrit par
un repli nationaliste qui exacerbe la haine de l’autre, ces « barbares »
venues des mondes arabes et africains, ces galeux d’immigrés, de musulmans à
qui elle veut retirer le droit du sol et toute aide sociale au profit d’une
prétendue priorité nationale. Comme si le logement, l’hôpital ou l’école
souffraient d’abord d’une présence étrangère ; comme si notre histoire ne
témoignait pas du fait que, contrairement aux arbres, le genre humain n’a ni
souche, ni racine mais un cerveau pour penser, le langage pour échanger, des
pieds pour bouger et une conscience pour éprouver des émotions personnelles et
collectives.
Son projet,
radicalement opposé à toute démarche humaniste n’est pas en reste sur d’autres
terrains. Ainsi de la culture où le FN
s’investit fortement ces derniers temps. Là aussi il tente d’exploiter le
désarroi identitaire de millions de français dans une Europe et un monde qui
leur échappe. Dans les communes qu’il dirige souvent allié à des groupuscules
intégristes et identitaires, il pratique des actes de censure. Dans le pays il
mène des actions violentes contre la création contemporaine qualifiée au mieux
d’élitiste et de bobo, au pire de pédopornographique.
Ne nous y
trompons pas : ce que rejette le FN c’est la capacité de l’art à
transgresser le réel, à innover, à anticiper le changement. Il prétend savoir
ce que le peuple veut en matière culturelle. En vérité, il tente de l’enfermer
dans une vision folkloriste et sclérosée du patrimoine et dans un
divertissement déconnectant la culture de toute vision critique et
émancipatrice.
Car le fond
du problème est là : le FN ne veut pas d’une société de liberté pour
chaque individu, d’égalité et de droit pour tous, encore moins de fraternité
entre chacun-e- quelques soient les origines et les convictions.
In fine
c’est la démocratie qu’il combat et c’est pour cette raison qu’il rallie ceux
qui le pensent incontournable pour conserver l’ordre inégalitaire établi et
surtout pour s’opposer à toute marche populaire et citoyenne vers
l’émancipation.
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