Les attentats du 13 novembre nous font entrer dans une
nouvelle ère. Elle doit nous conduire à mesurer, une fois de plus, l’urgence de
penser l’avenir de notre société. Pour cela il nous faut affronter un obstacle
redoutable, la peur. Elle s’installe subrepticement et son instrumentalisation
devient un moyen de gouvernement, un levier pour s’y maintenir ou pour y
accéder. Tout est bon en effet pour la susciter et l’entretenir. Les dernières
en date, la peur sécuritaire et celle de la guerre s’ajoutent à la peur sociale
qui ne désarme pas puisque le chômage est reparti à la hausse et à la peur
climatique trop souvent présentée comme inéluctable.
Ajouter les peurs aux peurs, les attiser en créant une
atmosphère dépressive dans le pays ne relève pas d’une démarche innocente. Nous
la pensions réservé au Fn qui sait si bien s’en servir pour distiller son venin
nationaliste et xénophobe et tenter de parvenir au pouvoir. Mais voilà que le
Premier ministre et le président du Medef ont inventé une peur supplémentaire,
la peur du Fn. Celui-ci serait devenu l’unique problème de la société
française, le seul horizon de la vie politique. Répétons-le, diaboliser le Fn sert
sa prétention à être le seul rempart au « système » et vouloir lui
opposer un front prétendument républicain sans autre contenu que les thèses du
Medef et l’idéologie guerrière, ne fait que conforter sa dénonciation de
« l’Umps ». D’autant que nous avons affaire, en réalité, à une
promotion du Fn à des fins politiciennes et électoralistes. Preuve en est
l’odieux amalgame qui est fait par le Medef entre le Fn et le Front de gauche.
Il faut se rendre à l’évidence, le Fn n’a pas le monopole de
l’exploitation politique des peurs. Nous savions déjà que la droite,
républicaine par antiphrase, s’est engouffrée dans cet exercice où excellent
désormais Sarkozy et Estrosi et quelques autres. Mais force est de constater
que le pouvoir y voit aussi le moyen de provoquer un réflexe légitimiste et
plébiscitaire autour du chef de l’Etat dans la perspective de 2017. De la
prolongation de l’état d’urgence à sa constitutionnalisation, de l’interdiction
de manifester à la fermeture arbitraire de lieux de culte, de la déchéance de
nationalité aux assignations à résidence, c’est aujourd’hui la République qui
est attaquée, la démocratie qui est menacée.
Surmonter la peur relève désormais d’une urgence politique
absolue si l’on veut retrouver l’espoir et la confiance populaire dans la
recherche et la construction d’un autre avenir que la domination sans partage
du capital et « la guerre des civilisations ». Notre peuple a les
forces en lui pour le faire en opposant aux peurs et à leur instrumentalisation
la force des idées émancipatrices et le rêve d’un monde, d’une Europe et d’une
France de l’égalité, de la liberté et de la fraternité.
Faisons-le dans les urnes, en favorisant la reconstruction
d’une gauche sociale, écologique, citoyenne et culturelle face à ceux qui
dénaturent la politique au profit de misérables calculs électoralistes.
Faisons-le dans les luttes en ne lâchant rien face au cynisme
patronal, aux prédateurs du climat et de la planète, aux fauteurs de de guerre
et de haine.
Faisons-le dans le débat des idées et des imaginaires pour donner
à nos valeurs humanistes la force matérielle de renverser l’ordre établi.
« A dater de ce jour-là, leur folie n’a plus été celle
de l’homme qui a peur, leur folie est devenue celle de l’homme qui rêve ».
Pasolini.
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