lundi 11 avril 2016

La laïcité selon Madame Badinter


Dans un entretien au Monde Mme Badinter s’en prend une nouvelle fois à cette « partie de la gauche imprégnée de l’idée que toutes les cultures se valent » et qui refuse d’interdire aux femmes musulmanes de  porter le voile. Mais Mme Badinter curieusement ne trouve rien à redire aux femmes juives orthodoxes qui portent perruques et bas ou encore aux Sœurs catholiques qui officient la tête couverte dans les hôpitaux ou les écoles confessionnelles. Dans le même entretien elle absout l’église face au scandale des prêtres pédophiles et n’a pas le moindre mot contre l’homophobie de la manif pour tous.

Sa critique ne porte que sur l’Islam. Elle revendique même son islamophobie,  suivie en cela par M. Valls. Mais l’islamophobie comme l’antisémitisme et tous les racismes sont des rapports de domination à l’encontre de populations érigées en bouc émissaire. Cette haine  ne se nourrit pas de la religion des groupes concernés même si c’est le motif invoqué. Rappelons que pendant des siècles les antisémites justifiaient leur judéophobie en accusant les juifs d’avoir assassiné le Christ. Ils leur imposèrent les métiers de l’usure tout en attribuant à leurs textes sacrés une prétendue passion pour l’argent ! Aujourd’hui  il n’est pas plus acceptable de justifier l’antisémitisme du fait des politiques d’occupation de la Palestine par Israël que de tolérer l’islamophobie du fait des attentats commis par Daesh.

Ma conception de la laïcité suppose de mener le combat contre toutes les formes de racisme en même temps qu’elle nous impose le respect absolu de la liberté de conscience de chacun-e-,  comme la stricte séparation des églises et de l’état. Contrairement à ce que prétend Mme Badinter, ce n’est pas au nom du communautarisme ou du différencialisme que la gauche doit défendre les minorités racisées et discriminées mais au nom de l’égalité républicaine.

Cessons de nous cacher derrière un universalisme abstrait et arrêtons de croire  que les croyances peuvent se dissoudre dans la loi et les interdits. On sait que le soviétisme antireligieux a permis aux églises de devenir le refuge de la lutte contre l’oppression. Le féminisme comme tous les combats émancipateurs, n’est pas seulement affaire de lois, c’est d’abord une question de débat, de conviction, de combats communs, ce qui suppose le respect de l’autre, de sa dignité et de son histoire.

C’est dans le rassemblement transformateur, unitaire et solidaire, que nous contribuerons aux luttes de libération des femmes de culture et de confession musulmane. Comme à celles de toutes les autres. Songeons aussi à tous ces jeunes français, garçons et filles, perdus dans la délinquance et/ou le djihad, que la République a abandonné dans les territoires de l’exclusion.  C’est à un avenir commun d’égalité, de liberté et de fraternité que nous devons les inviter.

Mais ce n’est pas la définition de la laïcité selon Mme Badinter, actionnaire principale de Publicis, 1e groupe mondial de communication et conseiller de l’Arabie Saoudite.

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