mardi 4 octobre 2016

Roman national ou récit émancipateur ?


« Quand vous devenez français vos ancêtres sont gaulois ! » Nicolas Sarkozy persiste et signe : chaque immigrant arrivé en France doit s’assimiler, abandonner son bagage culturel et adopter un mode de vie conforme à ce qu’il appelle le « roman national ». Contre toute vérité historique. Parce que le peuplement de ce pays est autrement plus divers que son image d’Épinal. De l’Homo erectus puis sapiens venus d’Afrique il y a des milliers d’années jusqu’aux grandes migrations de la révolution industrielle originaires d’Europe  (Italie, Espagne, Pologne, Portugal), de nos ex-colonies d’Afrique et d’extrême orient en passant par les grandes invasions romaines, nordiques (dont les Francs) et Arabes auxquels s’ajoutent les Juifs fuyant l’inquisition espagnole ou les pogroms de l’est européen, les mercenaires des armées royales et des régiments coloniaux des grandes guerres et les ultra marins, sans oublier la diversité des apports basque, occitan, corse ou alsacien….. Les historiens nous montrent  à quel point la population française a fonctionné au mélange et au métissage, renouvelé non par l’assimilation mais par l’enrichissement linguistique et culturel.

Le « roman national » a été fabriqué au 19è siècle par la hiérarchie catholique qui fixe son point de départ dans le baptême de Clovis et surtout par la 3è République qui, pour unifier le pays et arrimer les colonies à la France, invente le mythe gaulois notamment à travers l'instruction publique. Cette idéologie, réactivée par le FN, a toujours été un instrument de domination culturelle et politique au service des classes dominantes. Sarkozy nous la sert aujourd’hui pour mieux capter les peurs identitaires et le rejet de l’autre dans le contexte sécuritaire et xénophobe.

Si la question identitaire doit être traitée, je ne pense pas que c’est en allant sur le terrain de nos adversaires qu’il faut le faire. Nous accréditons l’idée que le débat identitaire est le seul débat de la présidentielle et nous légitimons les thèses nationalistes et xénophobes. Pour autant, faut-il entrer dans ce débat en lui opposant un « récit national » qui serait fondé sur la Révolution Française ?

Si celle-ci est fondatrice de notre histoire républicaine et de ses valeurs,  elle ne va pas jusqu’à abolir l’esclavage et instaurer l’égalité femmes-hommes. De même, la République qui suit, après avoir assassiné la Commune, est à l’origine de l’effroyable et honteuse entreprise coloniale. On voit bien que ce n’est pas seulement dans le miroir du passé que l’on peut définir une identité nationale de gauche et surtout construire l’avenir. Il faut s’inscrire dans la continuité des grands mouvements progressistes de notre histoire et rassembler les français  en respectant leurs origines et leurs mémoires.  Mais il faut surtout fonder la France de demain sur la capacité de son peuple à se doter d’un nouveau récit émancipateur qui lui permette d’apporter des réponses dans tous les domaines à la crise de sens qu’il connait.

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